Le Parlement examine en ce moment la nouvelle loi de programmation militaire (LPM) pour les années 2024 à 2030. Une LPM annoncée à 413 milliards d’euros. C’est pour l’ensemble de la représentation nationale l’occasion d’un examen attentif de l’effort que nous devons consacrer à nos armées. Et pour moi, l’enjeu d’une prise de parole pour notre défense nationale.
En mai 2014, j’alertais sur les risques que faisait peser Bercy sur le budget des armées. Notre défense nationale avait atteint ses limites en moyens humains et en équipements. Depuis, le contexte international n’a jamais été aussi volatile et nos forces armées si fortement sollicitées.
La guerre en Ukraine, sur le continent européen, ramène à la réalité nombre de responsables politiques qui pensaient que la guerre avait disparu et qu’il nous fallait « toucher les dividendes de la paix ». Nous devons tenir compte des leçons du conflit en Ukraine : l’heure n’est pas venue de réduire notre posture militaire ni de supprimer un avantage stratégique dont peu de pays peuvent se targuer.
Effort indispensable. 413 Milliards donc. Mais de la même manière que les affaires stratégiques ne sont pas des questions de morale, les problématiques de défense ne peuvent se satisfaire d’une approche uniquement comptable, court-termiste et d’un financement incertain. En période de montée des tensions, l’effort de défense est indispensable et il faut d’abord analyser ce dont nous avons besoin pour rester crédibles et opérationnels.
Le général de Gaulle avait réussi à construire une défense nationale exigeant une force conventionnelle puissante et une dissuasion nucléaire efficace. La France était alors souveraine, respectée, fidèle à ses alliances et capable d’initiatives indépendantes.
Face à la dégradation d’un ordre international remis en question à la fois par un Sud en recomposition, des BRICS qui construisent des alliances alternatives sans grandes perspectives démocratiques, une Onu affaiblie et des occidentaux plus isolés que jamais, il nous faut réaffirmer nos capacités à agir, nous défendre, garantir nos espaces stratégiques, notamment dans les outre-mer.
Soit nous réaffirmons la place particulière de la France sur la scène internationale, que notre pays a des responsabilités à exercer, des intérêts à protéger, des valeurs à porter, et alors notre effort de défense doit le traduire concrètement. Soit nous n’assumons pas cet effort et nous entérinons un déclassement définitif de notre pays. Il n’y a pas d’alternative. Il ne peut exister de politique étrangère efficace sans politique de défense crédible, elle-même soutenue par des capacités opérationnelles cohérentes, définissant une ambition stratégique. Plus encore, de notre défense aujourd’hui, dépend demain notre liberté de choisir notre destin, collectif et personnel.
413 Milliards donc. Mais cette LPM est-elle « sincère » ? Son financement est-il totalement garanti ? L’inflation est-elle correctement prise en compte ?
Chacun a compris que l’exercice méritait d’être repris. Soyons clairs, les orientations budgétaires proposées ne constituent qu’un minimum pour nos armées et leurs capacités opérationnelles, les gages de réalisation de cette LPM hypothéquant sa bonne exécution. Pour autant, faut-il tout jeter et refuser de voter cette LPM ? Certainement pas.
Visibilité. Nos armées comme nos industriels et l’ensemble de notre base industrielle et technologique de défense ont besoin de visibilité, de se projeter vers demain. Voilà pourquoi je demande à ce que, au-delà de nos divergences politiques, l’ensemble des responsables politiques retrouvent sur ce sujet crucial de la défense nationale le consensus qui, il y a peu, était la norme, afin de doter nos armées d’une LPM, certes imparfaite, mais impérieusement nécessaire.
Je sais aussi que le sujet de la LPM n’est pas actuellement celui du quotidien de nos concitoyens ; comme je sais aussi qu’un budget de 413 milliards peut paraître disproportionné à l’heure où nombre de nos concitoyens ont du mal à boucler leur fin de mois. Mais, en tant que citoyen français, et plus encore en tant qu’élu de la Nation, je serai toujours exigeant et vigilant sur les questions qui engagent le devenir de mon pays et sa crédibilité dans le monde et en Europe.
Il ne faut jamais oublier ce qu’est notre armée : des hommes et femmes au service de la France et des Français, mettant leurs vies en jeu pour protéger les nôtres.