INTERVIEW – Le député LR de l’Aisne, qui ne sait pas s’il votera la proposition de loi d’abrogation du groupe LIOT, regrette les «coups d’éclat» du petit groupe d’indépendants, qui s’est récemment affiché avec la patronne de la CGT, Sophie Binet.
LE FIGARO. – Vous avez voté la motion de censure pendant la réforme des retraites, pensez-vous aller dans le même sens en votant la proposition de loi du groupe Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires (LIOT) sur l’abrogation de la réforme ?
Pour le moment, ni oui ni non. Rien ne sert de se précipiter sur une position, il faut travailler pour proposer une alternative à cette réforme. Les députés LR qui étaient opposés à ce projet de loi du gouvernement – environ 25 – et ceux qui ont voté la censure – 19 – ne sont pas contre une réforme des retraites, mais contre celle-là. C’est ce qui nous différencie du Rassemblement national ou de la Nupes : nous sommes pour une alternative à ce texte.
À l’Assemblée, les débats ont été tellement déplorables que cette niche parlementaire va peut-être nous permettre de discuter des sujets qui nous intéressent, comme les annuités ou les régimes spéciaux. L’idée est d’essayer de pousser pour avoir un projet de réforme alternatif. Il faut faire de cette journée un atout et se redorer collectivement le blason.
En revanche, l’affichage effectué par le groupe LIOT hier en organisant une conférence de presse avec Sophie Binet, a de quoi refroidir. Je ne suis pas là pour sucer la roue de la CGT. Le dialogue social, oui, mais il est totalement hors de question d’être inféodé à un quelconque syndicat. Et je ne suis pas le seul à le penser chez LR : depuis hier, les langues se délient et certains collègues susceptibles de voter la PPL d’abrogation ont été échaudés. Chercher à faire des coups d’éclat tous les jours n’est pas la bonne méthode, inutile d’entrer dans une course à l’échalote.
Le président du groupe Liot, Bertrand Pancher, prépare selon plusieurs médias son « contre-gouvernement ». Pensez-vous qu’une majorité alternative puisse se créer à l’Assemblée nationale ?
Son idée relève plus de la Tour de Babel que d’un contre-gouvernement. La seule réalité, c’est que le président de la République n’a pas de majorité à l’Assemblée nationale et qu’il ne l’a pas encore intégré. Mais un exécutif avec une majorité est possible : cela nécessite pour cela qu’Emmanuel Macron change de programme, de méthode et d’approche. Et qu’il se rende compte qu’il est presque en situation de cohabitation.
Cette prise de conscience doit venir du président de la République. Il y a une majorité à droite dans ce pays et au Parlement. Reste à savoir quel est le programme.
Éric Ciotti a rappelé la ligne des Républicains en vue du 8 juin : LR est favorable à cette réforme des retraites mais une liberté de vote sera comme toujours donnée aux députés du groupe. Faut-il dégager une stratégie collective en vue de cette journée ?
Oui, nous devons absolument travailler collectivement au sein du groupe pour être en avance de phase. C’est quelque chose que nous n’avons pas suffisamment fait avant la réforme des retraites. Le séminaire de groupe que j’ai co-organisé la semaine dernière allait d’ailleurs dans le sens de cela : plus d’échange sur les sujets de fond, plus d’anticipation. On ne peut pas faire la politique de l’autruche et ne pas être présent dans l’hémicycle le 8 juin.
Nos quatre prochaines réunions de groupe doivent exclusivement traiter de cette niche et de ce sujet. Nous devons mettre au point une stratégie afin que cette journée ne nous mette pas politiquement en péril. Si chaque divergence de vues doit être exprimée, cela ne doit pas nous empêcher de dégager entre 10 et 15 amendements de groupe que nous aurions tous travaillé ensemble : sur la question des femmes, des carrières longues, etc. Nous devons pouvoir collectivement incarner toutes les droites.